On ne présente plus Miky Picon, celui qui fut longtemps l’élève modèle du surf européen, inspirant et aspirant dans son sillage toute une nouvelle génération de surfeurs plus motivés les uns les autres d’accéder, comme lui, à l’élite du surf mondial. Aujourd’hui, Miky a quitté les lycras mais pas Quiksilver, papa d’un jeune Kyan grâce à sa magnifique compagne, voici aujourd’hui pour vous, le récit d’un homme comblé et d’un surfeur d’exception…
Salut Miky peux-tu nous raconter des débuts dans le surf stp ?
J’adorais juste être dans l’eau, je prenais tout ce que je trouvais sur la plage ou chez moi pour m’amuser : planche, longboard, skimboard, bodyboard… juste histoire de glisser.
Pourquoi le surf ?
Mon père surfait et c’est le sport qui m’a le plus attiré. J’étais déjà entouré de surfeurs, du coup ce choix s’est fait naturellement.
Quand as-tu décidé de passer pro ?
A 15 ans, quand j’ai décidé de m’écarter des études et de partir à l’étranger. C’était un choix vraiment pas facile, je n’étais pas sûr d’y arriver. J’espérais faire le bon choix bien sûr.. Mais cette incertitude m’a poussé à travailler dur, à faire beaucoup de sacrifices. On n’a rien sans rien.
Comment s’est passée ta rencontre avec Quiksilver ?
A 15 ans toujours, j’habitais à Capbreton. Pierre Agnès était de Capbreton également et Yann Martin m’a présenté à lui. Changement d’état d’esprit, un nouveau départ avec un team qui avait de gros objectifs à tous les niveaux. C’était beau de faire partie de la marque.
Parle-nous de l’époque où tu étais sur le wqs, Toby Martin m’avait dit, à l’époque, que ce Tour était l’arène des Gladiateurs..
C’était complètement ça… Cela a bien changé ! C’est différent aujourd’hui avec le système des priorités, les primes etc.. Avant, il fallait aller partout toutes les semaines, passer 4 tours avant d’atteindre le main event. Aujourd’hui, les nations se sont bien ouvertes, le surf est vraiment devenu une grande famille avec un esprit plus ouvert.
Malgré cela tu réussis à intégrer l’élite en 2006 est à marquer l’histoire du surf européen, quel est le moment qui t’as fait accéder au Dream Tour ?
J’ai travaillé avec un psychologue du sport qui m’a fait passer un cap… Qui m’a appris à me connaître et à me préparer mentalement, ça été un réel plaisir de découvrir ce côté mental de mon sport.
Tu es ensuite descendu à nouveau en wqs mais tu as trouvé la force de revenir dans l’élite ?
Je me suis senti très seul sur le WT , je n’avais plus mes amis, plus ma famille et je pense que ça m’a pénalisé au niveau de la confiance. Dès que je suis revenu sur le QS, j’ai remis en place ma routine. Accompagné de mes amis, je me suis requalifié tranquillement… J’avais du mal à croire que je pouvais revenir à ce niveau tant j’en aavais bavé la première fois.
2008 C’est l’année de l’Euroforce, le plus beau moment de surf européen.
Tous les surfeurs européens sur le tour se sont alliés et soutenus mutuellement.. Ce n’était pas une association et ou équipe fermée, c’était juste un état d’esprit, une sorte d’alliance entre nous. Nous savions qu’ensemble, nous pourrions peser davantage dans ce milieu anglo-saxon.
Avec le recul pourquoi les européens, et les français en particulier, ont-il mis autant de temps pour accéder à l’élite, et pourquoi n’avons-nous pas plus de représentants ?
Parce que nous manquions de locomotives. Nous sommes un petit pays par rapport au Brésil ou aux Etats-Unis, avec beaucoup moins de pratiquants. Mais aujourd’hui, le surf francais est reconnu mondialement grâce à ce travail collectif et surtout grâce a Jérémy qui a planté le drapeau très haut !
Quelle est notre plus grande chance à l’avenir ?
Noa Dupouy, Sam Piter, Marco Mignot, Kauli Vaast. Ensuite dans l’engagement Justin Bécret et Kyllian Guérin ont aussi un énorme potentiel.
On voit que les marques ne jouent pas trop le jeu avec nos représentants, des riders comme Johanne Defay (meilleure surfeuse européenne de tous les temps) ou encore Alizé Arnaud (championne du monde) n’ont toujours pas de sponsors..
Le sport féminin est assez injuste, et ce n’est pas forcément la meilleure surfeuse qui sera la plus soutenue. Avec les réseaux sociaux aujourd’hui tout a changé dans le sport. Le consommateur aime les histoires et le marketing aime les raconter. C’est à l’athlète de développer un profil qui plaise… On peut donc dire qu’il n’y a plus que les résultats qui comptent.
Tu quittes le Tour mais reste auprès de ton sponsor de toujours, comment se gère l’après carrière lorsque tout s’arrête ?
Tu fais des stages dans tous les départements pendant un an pour comprendre le fonctionnement global. Et tu passes du WCT ou Pipeline au stock de Capbreton… Faut repartir en bas de l’échelle, mais c’est un challenge. Quiksilver m’en a donné l’opportunité, si tu es un guerrier, tu ne refuses pas et tu y vas car en quelques années, tu risques de te prendre un mur. Le rêve s’arrête plus vite que ce que l’on croit.
Tu as connu l’époque la plus charismatique du surf de compétition, quels sont tes meilleurs souvenirs et que regrettes-tu ?
Andy, Bruce, Kelly, Parko, Taj, Dane, Jordy, Mick… voilà à quoi ressemblait le tour quand j’y étais, bonne chance ! héhé..C’était incroyable, j’étais le seul Européen et j’avais une super relation avec tous. Je passais mon temps avec Parko à J.Bay. Andy et Bruce m’invitaient chez eux a Kauai, je crois qu’ils me respectaient et me considéraient comme un véritable ami. Je ne regrette pas grand-chose, c’était top !
Le newschool a pris sur le pas sur la glisse, même si l’on constate un retour sur la vague avec des critères de jugement plus adaptés, quelle bilan tires-tu de cette progression du surf à laquelle tu as contribué ?
Je pense qu’il y a eu des périodes d’adaptation. Du coup, il y eu des moments un peu injustes pour certains surfeurs. Mais bon, dans l’ensemble à présent la WSL fait un super boulot et le jugement est bien. Il y aura toujours des mécontents mais le surf reste un art qu’il est difficile de juger.
Parlons un peu de ta nouvelle carrière chez Quiksilver, quelle y est ta position ?
Global Sports Marketing Surf. Je gère les team managers régionaux et les budgets surf qui comprennent tous les contrats, prime, voyages mais aussi la stratégie des athlètes au travers de notre marque. J’aime beaucoup mon job même si il y a des moments difficiles puisque la plupart des surfeurs sont mes amis proches.
Les sponsors recherchent maintenant des vecteurs de leur produits plus que des performances en compétition, crois-tu que les meilleurs surfeurs soient ceux du Tour ou les plus médiatisés, car on a vu que des inconnus comme Chippa Wilson sortis de nul part pouvaient rivaliser avec les meilleurs dans certains domaines.
Oui chaque marque a son marketing et certaines catégories de produits à promouvoir.. A chacune de trouver les athlètes qui correspondent le mieux à leurs produits afin de raconter leur propres histoires. Aujourd’hui, nous disposons d’outils de mesure qui n’existaient pas avant et permettent de confronter nos choix aux retours sur investissement par exemple.
Comment vois-tu le surf demain, que ce soit en free surf comme en compétition ?
En free surf le big wave a et aura encore un énorme impact. En compétition les airs eux, sont toujours plus hauts plus forts, le surf lui, plus puissant et les tubes plus gros. Tout est pareil mais en toujours plus grand.
On termine avec un mot sur ta vie personnelle de papa à plein temps et conjoint de mannequin célèbre dans le monde entier ?
Je suis comblé avec ma future femme Filippa et notre petit garçon Kyan. Je les aime plus que tout au monde. Les enfants, c’est ce qu’il y a de plus beau dans une vie… 10 fois mieux qu’un tube a Pipeline ou qu’une victoire ..héhé !!
Une interview de Johann Mouchel pour XLMag
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